« Infrastructures féministes et réseaux communautaires » : notes de lecture

Voici mes notes de lecture concernant l'article « Feminist infrastructure and community networks: an opportunity to rethink our connections from the bottom up, seeking diversity and autonomy ».

Littéralement : « Infrastructures féministes et réseaux communautaires : une occasion de repenser nos liens depuis la base, en quête de diversité et d'autonomie ».

Il est écrit par par Bruna Zanolli, Carla Jancz, Daiane Araujo dos Santos, et Débora Prado. Elles sont chercheuses et/ou militantes au sein de réseaux de télécommunication communautaires (radio ou internet) au Brésil. Certains de ces réseaux permettent l'accès à internet, d'autres non. Voici les structures auxquelles elles appartiennent :

OBJECTIF Structurer des notes m'aide à ne pas tout oublier (je lis rarement des « trucs sérieux » de ce genre). Si en plus ça peut vous donner envie de lire l'article, ou vous donner des pistes c'est chouette :-). En tout cas… Ça n'est ni un résumé, ni une analyse critique…

Fracture numérique

La réduction des inégalité de connexion à une grille simpliste (« les déconnectés » vs « les connectés ») invisibilise les diversités de situations, profils et donc de particularités et capacités d'action de ces personnes et communautés.

NDJ: En France, la « zone grise » ou « zone blanche » va probablement un cran plus loin dans ce masquage.

➡️ nécessité d'entendre plusieurs voix, de visibiliser les inégalités dans ces « groupes » ou « communautés » afin de construire des projets communautaires qui les prennent en compte.

Un des risques de ne pas réfléchir à ces différences et ces rapports de pouvoir est de mal évaluer le succès d'un réseau communautaire : le compter en nombre de raccordements, en ignorant par exemple le travail pour éclater les rapports hiérarchiques, d'autorité, le rapport à l'expertise… Bref, les inégalités.

➡️ proposition d'une analyse intersectionnelle (étude croisée des rapports de domination) du fonctionnement de ces communautés.
➡️ extension de la notion de technologie : exister, vivre, aimer, souffrir, résister, organiser, cuisiner…
➡️ extension de la notion d'infrastructure à tout ce qui permet d'opérer ces technologies : logiciel, matériel informatique, mais également mode d'organisation participative, safe-spaces, solidarités sociales…

Le sections suivantes détaillent chacune un retour d'expérience de réseaux de télécommunication construit avec une approche féministe.

Rede base comun (Brésil)

Réseau « mesh » (réseau relayé de personne raccordée en personne raccordée) créé par des femmes d'une communauté locale. S'appuie sur un réseau humain existant. Le groupe à l'origine de ce projet s'est rencontré et fédéré autour du mouvement social « garderies pour tou·te·s » de 2008 à São Polo.

Les interactions pré-existantes entre les personnes ont aidé à prendre en compte correctement les besoins spécifiques de cette communauté.

Problèmes successifs rencontrés :

  • localement, absence d'offre de formation pour acquérir les compétences informatiques nécessaires.
  • distance avec le milieu libriste (peu de femmes dans les réseaux libres).
  • formations pas très autonomisantes : courtes, ce qui ne laisse que le temps d'appliquer clef-en-main des tecnologies prédéfinies plutôt que de laisser la place de confronter l'expertise du terrain avec l'expertise technique extérieure pour faire des choix éclairés.

➡️ finalement, Base Comum a pu trouver quelques espaces de formation impliquant des femmes, et les autrices notent quelques points intéressants à leur égard :

  • une attention aux « infrastructures féministes » (cf avant) était portée
  • les pratiques de terrain étaient prises en compte (ex: on apprend à faire avec Windows, parce-que les gens l'utilisent, ET avec Linux parce-que ça a du sens politiquement) ➡️ on rapproche les outils des gens plutôt que de les faire se sentir nuls.

Dans les cartons du projet, une réflexion sur la modération collective des contenus (éviter notamment harcèlement ou divulgation d'infos privées).

Fluxico : une pirate-box sur mesure

À la manœuvre, un groupe travaillant le sujet des « réseaux féministes autonomes ».

Elles ont finalement trouvé un moyen d'action dans un réseau très très local (un unique point d'accès wifi) plutôt que dans l'accès internet comme initialement pressenti. Le logiciel pirate-box qui constitue la base technique a cependant été fortement adapté : traduction portugaise et interface adaptée pour ne pas rester une simple « technologie extra-terrestre » : choix d'un vocabulaire, d'un nom et de métaphores propres au contexte local dans l'interface.

Les fuxico désignent des fleurs DIY assemblées à partir de restes de tissus. La métaphore de l'échange de graines était également employé dans l'interface.

L'usage de métaphores constitue l'acceptation de réalités subjectives et multiples. La métaphore n'est pas légitimée parce qu'elle est vraie, mais parce qu'elle fait tilt émotionnellement chez de nombreuses personnes dans la communauté.

Radia Mulheres Pankararu

Pankaru = territoire indigène, ~7 000 personnes, en lutte permanente pour garder leur territoire.

Radio locale LPFM (FM à base puissance) sur cette zone. Du fait de l'isolement, elle constitue une des 2 seules radio captées dans la communauté. Ce devient un outil de diffusion assez large et qui rencontre un bon succès sur ce territoire un peu étendu et néanmoins mal connecté à internet.

Le collectif de cette radio a monté des formations pour apprendre à produire de l'audio et faire tourner la radio avec des logiciels libres. Essaimant depuis le local de cette radio, les initiatives autour de l'informatique libre et du féminisme se multiplient.

PS: merci à zorun d'avoir porté cet article à ma connaissance à l'occasion de l'AG de la FFDN.